Méthodologie : Ciblage des potentiels de désimperméabilisation

AUTEUR·RICE
Cerema (Olivier Gradel), Guillaume Chrétien
RELECTEUR·RICE
François Chevaux
DATE DE PUBLICATION
20 août 2025

Cette méthodologie, nommée EPODES1, est une adaptation des travaux de la Direction territoriale Sud-Ouest du Cerema. Elle permet d’évaluer l’infiltration de l’eau et le potentiel de désimperméabilisation des sols.

La méthodologie a été créée dans le cadre d’études relatives à l’identification du potentiel de désimperméabilisation des sols sur les territoires des villes d’Angoulême, Libourne, La Rochelle et de la communauté de communes Maremne Adour Côte-Sud (période 2020-2023). Dans ces études, le Cerema a mobilisé de nombreux traitements informatiques pour produire des couches géographiques relatives au potentiel de désimperméabilisation des sols.

La Direction Territoriale Normandie Centre a appliqué cette méthode à la commune de Barentin avec quelques adaptations dans un souci de descendre à une échelle plus fine pour l’analyse des résultats.

Principes de l’évaluation du potentiel de désimperméabilisation des sols

Le schéma ci-dessous illustre les différentes étapes nécessaires pour cibler les zones les plus adaptées à la désimperméabilisation.

source: Cerema

source: Cerema

Infiltrabilité

L’infiltrabilité tient compte :

  • de la perméabilité du sol (source BRGM) et documents transmis par les collectivités): texture du sol (sable, limon, argile), couches hydrogéologiques et exploitation de 47 sondages (lotissement Garnier, résidence Océane, notice eaux pluviales France Lot, étude pré-opérationnelle pour le plan de renaturation du centre ville ainsi que 32 sondages présents sur le site national de la Banque du Sous-Sol)
  • des critères environnementaux :
    • pentes (source IGN) : Les pentes peuvent être localement fortes voire très fortes. Le risque est alors le phénomène d’exfiltration, lié à la pente, aux écoulements souterrains préférentiels ou à la nature des roches. Sur les pentes abruptes, l’eau a tendance à ruisseler plutôt qu’à s’infiltrer, ce qui augmente également les risques d’érosion et de glissements de terrain.
    • sites et sols pollués (source Géorisques): la pollution présente dans les sols de plusieurs anciens sites industriels est souvent concentrée (teneurs élevées sur des surfaces concentrées). L’infiltration des eaux pluviales peut occasionner la migration de cette pollution contenue dans le sol vers les nappes phréatiques et détériorer la qualité des masses d’eaux souterraines.
    • retrait-gonflement des argiles (source BRGM) : les argiles présentent un potentiel de retrait-gonflement. Ce potentiel de gonflement en présence d’eau et de rétractation est plus important en saison sèche. Dans les cas les plus défavorables, un doublement voire un triplement de volume de l’argile est envisageable. Ces changements de volume induisent des tassements différentiels et des mouvements de terrains se répercutant sur la solidité des ouvrages. Ce potentiel donne également une information sur la perméabilité des sols, les argiles étant peu perméables.
    • cavités souterraines (source RICS2 2018) : la présence de ces cavités peut poser bien souvent un problème de sécurité pour les personnes et les biens avec un risque d’effondrement. Ces risques sont d’autant plus importants en présence d’eau qui peut augmenter le risque de déstabilisation du toit des carrières.
    • captage d’eau potable (non présent sur la commune de Barentin),
    • remontée de nappes et sols hydromorphes (source PPRI3 et RRP4) : si des éléments pluvieux exceptionnels surviennent et engendrent une recharge exceptionnelle, le niveau de la nappe peut atteindre la surface du sol. La zone non saturée est alors totalement envahie par l’eau lors de la montée du niveau de la nappe : c’est l’inondation par remontée de nappe. On conçoit que plus la zone non saturée est mince, plus l’apparition d’un tel phénomène est probable. L’infiltration des eaux pluviales dans les secteurs où la nappe est sub-affleurante n’est pas recommandée pour plusieurs raisons. En effet, lors des plus hautes eaux, la nappe risque d’empêcher l’infiltration dans les sols : l’évacuation des eaux pluviales ne sera plus permise et des risques de débordement localisés peuvent apparaître. De plus, la vulnérabilité de la nappe superficielle au transfert des polluants est particulièrement importante.

Cette analyse du sous-sol permet de produire une cartographie hiérarchisant les secteurs les plus propices à l’infiltration.

Imperméabilité

L’imperméabilité du sol est variable en fonction de l’occupation de ce dernier. Cette connaissance est notamment possible grâce à la couche d’information « Imperviousness » issue du programme européen Copernicus, mais également d’autres sources issues des données d’occupation du sol.

Pour affiner l’analyse, cette donnée peut être croisée avec les données d’occupation du sol (modèles locaux ou nationaux) qui caractérisent les postes « bâtis » (routes, zones d’activités, zones d’habitat dense ou diffus, équipements…).

La désimperméabilisation est d’autant plus pertinente qu’elle porte sur les zones les plus imperméabilisées en surface, potentiellement les plus opportunes pour accueillir, à terme, des opérations de désimperméabilisation.

Quelques adaptation locales

La méthodologie du réseau Cerema a été appliquée avec les quelques adaptations suivantes :

  • Pentes (source IGN) : utilisation du LidarHD à une maille 0.5m au lieu du RGE ALTI à une maille 1m. La classification des pourcentages de pentes a été également relevée : contraintes moyennes pour les pentes de 10 à 20% et contraintes fortes pour les pentes supérieures à 20% (seuils de 5 et 10% dans la méthologie initiale). Cela permet, à une échelle communale, des résultats moins bruités et plus discriminants.

  • Pour les remontées de nappe, la donnée du BRGM n’a pas été utilisée pour deux raisons :

    • Barentin est couvert par un Plan de Prévention des Risques qui a recensé les remontées de nappes,
    • la maille carroyée très lâche n’est pas adaptée à une analyse à l’échelle communale.
  • Pour remplacer cette notion de remontée de nappe potentielle, un critère a été ajouté pour mettre en évidence les échanges d’eau entre le sol et la surface dans le fond de vallée : les sols hydromorphes (source : Référentiel Régional Pédologique).

Apports et limites de la méthode EPODES

Reproductibilité

Cette méthode utilise principalement des données nationales tout en intégrant des données recueillies localement mais non indispensables : elle est reproductible assez aisément sur d’autres territoires moyennant une collecte de données minutieuse sur les données de perméabilité. Cette méthode, utilisée précédemment pour cibler des zones à grande échelle (grande commune ou intercommunalité par exemple), a pu être adaptée à l’échelle d’une commune de 12 000 habitants.

Enjeux Données disponibles nationalement Données disponibles localement ou créées pour l’étude
💦 Perméabilité (travail chronophage d’analyse des textures de sols) Partiellement : données BRGM (BSS) qui nécessitent d’exploiter des pdf de qualité hétérogène, BD Lisa (données hydrogéologiques) Données issues de sondages de sols disponibles sur demande auprès des collectivités
↘️ Pentes IGN (RGE ALTI ou LIDAR HD) non
🛢️ Sites et sols pollués Géorisques non
🟧 Retrait gonflement des argiles BRGM non
🕳️ Cavités souterraines non : données non à jour sur Barentin Recensement des Indices de Cavités Souterraines (RICS)
🔃 Remontée de nappes / sols hydromorphes BRGM Plan de Prévention des Risques Inondations / Référentiel Régional Pédologique
🛣️ Imperméabilité des sols Copernicus Imperviousness non

Suites à envisager

La carte interactive proposée peut être un support de réflexion pour les différents acteurs travaillant sur l’aménagement et servir de base pour une traduction opérationnelle en actions via le déploiement d’une stratégie de désimperméabilisation.

Limites

  • La précision de la cartographie est dépendante du maillage des données recueillies. En effet, le modèle de la méthodologie passe de données ponctuelles à des données surfaces, ce qui peut conduire à des approximations cartographiques lors du travail d’interpolation géographique des données sur les sols. La présente étude ne prévoyait pas de carottages complémentaires pour améliorer la connaissance de la texture des sols mais c’est un volet qui pourrait être développé.
  • La couche retrait-gonflement des argiles du BRGM présente des incertitudes car elle est issue de la carte géologique native au 1 / 50 000.
  • Le recensement des cavités souterraines datait de 2018 lors de la réalisation de l’étude, et la mise à jour prévue fin 2025 n’a pas pu être intégrée aux calculs.
  • Les données de pourcentage d’imperméabilisation du sol -Copernicus Imperviousness- datent de 2018.

Il est nécessaire d’interpréter les résultats au regard de ces limites, de confronter les analyses macro aux photos aériennes les plus récentes et de procéder à la collecte des données les plus récentes pour les études opérationnelles.

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Notes de bas de page

  1. EPODES : Evaluation du POtentiel de Désimperméabilisation des Sols↩︎

  2. RICS : Recensement des Indices de Cavités Souterraines↩︎

  3. PPRI : Plan de Prévention des Risques Inondation↩︎

  4. RRP : Référentiel Régional Pédologique↩︎